La chefferie traditionnelle des régions du Centre, du Sud et de l’Est au Cameroun a subi une réelle mutation avec l’arrivée de la colonisation. Cette colonisation qui a reconfiguré l’autorité traditionnelle de cette vaste zone forestière en un simple auxiliaire de l’Administration. Désormais, il collecte l’impôt, communique la volonté du pouvoir central aux populations. Cette nouvelle fonction la décrédibilise auprès des populations ;il est méprisé de ses sujets qui l’insultent et parfois lui tapent dessus.
Pour revaloriser l’autorité bafouée des chefs traditionnels dans l’Arrondissement de Mboma, les chefs se sont réunis en une Association dénommée : Association des Chefs Traditionnels d’Ayong Yérap (ACTAY).
L’ACTAY est Composée de 13 chefs traditionnels, 13 sous-chefs, 13 notables, 13 femmes choisies dans 13 villages ; ces femmes ont pour mandat de représenter les femmes d’abord et et quelques personnes ressources ensuite.
Le dynamisme du président a poussé à intégrer les aspects de genre à l’intérieur de l’organisation. Une mini-structure prenant en charge spécifiquement les problèmes des femmes a été mise sur pied.
A leur tête et dans chaque village, une femme au charismatique et dont les aptitudes au leadership sont éprouvées est choisie par les autres femmes du village pour répondre en leur nom auprès de l’Association des chefs traditionnels elles s’appellent les “Cheftaines”.
Les cheftaines sont impliquées dans la prise de décisions. Elles sont là bien représentées à la réunion des chefs traditionnels de l’Ayong Yerap. Elles recensent les problèmes des femmes, donnent des conseils et tranchent les litiges à leur niveau, à l’instar des tribunaux de 1ère instance de nos juridictions modernes.
Tout problème dépassant les compétences de la cheftaine est porté au niveau du chef du village pour y être pour examiner et juger ave en présence de tous les notables.
Les cheftaines contribuent physiquement et financièrement aux réunions de l’association des chefs traditionnels d’Ayong Yérap.
Elles traduisent la volonté des femmes par rapport aux intérêts supérieurs de tout le village.
Les Cheftaines n’appartiennent pas à la famille royale comme les chefs, mais elles ont de l’influence comme ces derniers et parfois même plus que les chefs.
Au moment des réceptions (cérémonies) l’ordre de passage du protocole, commence par les cheftaines
Les cheftaines prennent la parole avec aisance au milieu des chefs et débâtent des sujets les plus préoccupants de l’heure tels que :
· Le positionnement des femmes dans les chaines de valeurs agricoles,
· L’éthique ou déontologie des chefs traditionnels.
La place de la femme dans les instances de prise de décision.
A travers cette organisation, les préoccupations des cheftaines, qui sont des préoccupations des femmes sont prises en compte, trouvent des solutions endogènes et elles sont parfois transmises à qui de droit. Les rapports mensuels de l’ACTAY font ainsi l’état de ces préoccupations et leur dépôt auprès de l’administration territoriale. Ces rapports témoignent de l’intérêt que ces inquiétudes trouvent auprès des pouvoirs publics.
L’idée d’introduire les cheftaines à l’association des chefs traditionnels vient ainsi ramener dans l’actualité la place de la femme dans la vie quotidienne de la communauté en Afrique noire précoloniale en général et chez les peuples du Cameroun précolonial en particulier. Cette approche vient aussi dévoiler la politique gouvernementale qui voudrait mettre la femme rurale au centre des instances de prise de décisions. Les cheftaines contribuent efficacement au développement du village par leurs interventions.
MBALLA BELINGA Jean Aimé,
Animateur. formateur.
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janaz | 13 Octobre 2019